Little Brother, le Big Brother social

Banksy - What are you looking at ?

Ce lundi Pascal Claude (RTBF – Matin Première) m’a interviewé en compagnie de François suite aux mésaventures de Pieter De Crem avec la blogosphère. Pieter De Crem était l’invité de Matin Première ce mercredi 3 décembre.

Sans doute parce que l’AFP a cité une de mes opinions pour étayer une dépêche.

Dans nos échanges je revenais sur ce que j’appelle le Big Brother social. Un concept que j’esquissais pour le Télémoustique dans une liste des choses qu’Internet a changées dans nos vies.

Rappel :

Rémanence et intimité, l’émergence du Big brother social

Le droit à l’oubli est en train de disparaître. Une connerie rendue publique est éternelle. La numérisation et la publication des archives anciennes remettent en lumière des histoires oubliées, des problématiques parfois résolues mais surtout méconnues, qu’une nouvelle actualité vient soudain remettre sur le devant de la scène.

La vie privée des célébrités est la cible du premier APN venu, celle du commun suit le même sort dès qu’il y a moyen de rire de ses malheurs ou infortunes. Tout possesseur d’un GSM est un paparazzi potentiel.

Les anglo-saxons parlent de « Little Brother », de surveillance par les pairs plutôt que par une force étatique.

Si c’est partiellement la méconnaissance de cette tendance lourde qui a permis le déclenchement de l’affaire du voyage à New York, certains articles récents et expériences en cours laissent à penser que nous n’en sommes qu’au début d’une ère où l’espace publique sera un espace de totale transparence, certains y voient un enfer pour la vie privée.

Je vous propose de passer en revue quelques phénomènes qui soutiennent cette tendance.

La mort du off et la sousveillance

Little Brother is watching you Même en Belgique le off est mort. Bart De Wever en a fait publiquement l’expérience sur les ondes de la RTBF. L’équipe De Crem aussi en s’épanchant auprès d’une barmaid. La confidence c’est un scoop en devenir. L’oublier c’est s’exposer.

La multiplication des techniques d’enregistrements ou de broadcasting (Qik, Ustream) permettent la généralisation de la sousveillance. Le compte-rendu vidéo par les participants à un évènement.

La police française a récemment fait les frais de la sousveillance, une bavure filmée, la réaction envisagée par la force publique, enregistrer également des images de ses interventions pour contrer les images des citoyens. Surveillance contre sousveillance. de beaux jours pour les tribunaux.

La présence virtuelle et le contrôle panoptique

La présence en ligne grâce aux messageries instantanées, googler les gens, les réseaux sociaux sont autant d’éléments qui permettent à tout un chacun de suivre les activités d’un individu. D’autant qu’avec l’apparition d’agrégateurs de réseaux sociaux tels les
Power.com, Spokeo, Socialstream et autres moteurs de recherche de personnes comme 123people l’accès aux infos personnelles, à la présence en ligne au réseau d’amis est toujours plus aisé.

Un univers digital panoptique se met doucement en place et se renforce à mesure que les réseaux sociaux consolident leurs liens avec des applications sociales populaires. Twitter & Facebook ou MySpace; Flickr et les mêmes…

Communiquer c’est être visible et identifiable et certaines des informations diffusées le sont parfois au-delà de ce que les émetteurs imaginent possible. Voir à ce sujet la géolocalisation de Twitter.

L’espace publique transparent et l’intelligence collective

On se souvient du futur de la vidéo-surveillance décrit par David Brin dans son article The Transparent Society publié dans Wired en 1996. On consultera aussi un article du NYT qui relate une expérience du M.I.T. sur l’analyse par des senseurs ou des traces digitales (GSM, GPS, RFID,…) des comportements d’un groupe d’étudiants qui partagent le même « dortoir ».

Ce genre d’analyses tendent à peaufiner et modéliser des comportements standards et construire des modèles prédictifs pour les commerçants, les assureurs et le business à moindre coût. Au final à faire entrer les humains dans des cases en donnant une seconde vie au data mining de papa et en le couplant à de l’analyse de donnée plus pointue.

On appelle ceci de l’autre côté de l’Atlantique l’intelligence collective. Bien évidemment les applications sont infinies, prometteuse, inquiétantes et ne semblent pas alarmer outre mesure l’opinion. A quand l’établissement de schémas sociaux « conformes », l’analyse de schémas déviants sur base d’un localisation d’un GSM ou d’autres émetteurs ? La prédiction des comportements sur base de l’analyse collective ?

En conclusion

Le train est en route, le débat autour des réseaux sociaux se centre sur l’agrégation ou la fédération, on ne va pas interdire les APN en rue comme on le fait lors des premières de cinéma et le contrôle social de l’autorité reste majoritairement conçu comme un garde-fou utile.

Avons-nous raison de ne pas nous alarmer ? Etait-ce là le danger que Pieter de Crem percevait du non-event qu’il a vécu ?

Je suis curieux de connaître votre opinion.

Merci à Damien pour son aide dans la collecte de certains liens.

3 réflexions sur « Little Brother, le Big Brother social »

  1. Voici mon avis:

    1- Le « off » journalistique qui a été brisé avec Bart De Wever est une faute professionnel et qui à mon avis n’a rien à voir avec « little brother ». Il s’agit d’une pratique aussi vieille que le métier (le off pas le fait de le briser 🙂 ).

    2- J’aurais plutôt peur de l’utilisation que « Big Brother » pourrait faire de « Little Brother »: surveillez vous les uns et les autres. C’est déjà le cas en Corée (je peux me tromper sur le pays je ne trouve plus l’info) ou les citoyens reçoivent de l’argent s’ils arrivent à filmer un délit.

    3- « Little Brother » peut jouer le rôle de chient de garde (cfr bavures policières en France) mais quid de l’éthique? Chaque être humain, quelle que soit sa fonction à droit à une vie privée.

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